La FSU conteste les orientations du rapport Moreau dont le fil conducteur de la réflexion semble être l’élaboration de mesures à même d’ajuster les pensions aux ressources des régimes.

Nouvelle réforme des retraites annoncée :

Les 20 et 21 juin doit se tenir, dans le cadre de la deuxième conférence sociale, une table ronde consacrée aux retraites. Dans le contexte d’une politique de rigueur pour les uns, d’austérité pour les autres, il faut s’attendre à l’annonce de nouvelles régressions pour les pensions de retraite.

Le Président de la république a donné le ton, reprenant une argumentation connue : l’espérance de vie gagne trois mois chaque année, il faudra donc travailler plus longtemps. Avec le chômage des jeunes et celui des seniors, travailler plus longtemps, encore faudrait-il que ce soit possible. Il s’agit, en fait, encore une fois, de masquer le problème car il n’est pas question, pour les possédants, de remettre réellement en cause la répartition actuelle des richesses produites, notamment de la valeur ajoutée en diminuant la part laissée aux dividendes. Il faut donc faire accepter le recul de l’âge de la retraite et la diminution des pensions et aussi de faire plus de place à la capitalisation, pour ceux qui peuvent se le permettre.

Mettre l’opinion publique en condition

Pour atteindre ces objectifs il est nécessaire de mettre l’opinion publique en condition. La majorité des médias, depuis la télévision jusqu’aux journaux, développent une propagande dans ce but :

- Ils présentent les retraités comme des privilégiés, et parmi eux les fonctionnaires. La Cour des Comptes ne s’en prive pas. L’annonce est donc faite que ces derniers, non seulement ont la sécurité de l’emploi garantie par leur statut, mais ils gagnent, en moyenne davantage que dans le privé ! Bien sûr on se contente d’une information brute. On ne précise pas que si les fonctionnaires d’Etat, en moyenne, ont un salaire plus élevé, ce n’est pas le cas pour ceux de la Fonction Publique Territoriale dont les salaires moyens sont inférieurs de 200 euros. Ce n’est pas le cas non plus pour les cadres du public : ceux du privé gagent en moyenne 1000 euros de plus. On ne dit pas non plus que la fonction publique comprend proportionnellement un plus grand nombre de cadres et que les fonctionnaires sont, dans l’ensemble, plus âgés, ce qui a pour conséquence de faire grimper la moyenne.

- Ils dénoncent « les avantages des fonctionnaires ». La télévision publique, Antenne 2 pour ne pas la citer, s’attaque au calcul des pensions sur la base des six derniers mois. L’exemple choisi est celui basé sur un traitement de 4000 euros par mois, comme si c’était le cas pour tous les fonctionnaires. (La moyenne est de 2500 euros pour 2082 euros dans le privé !). La proposition est donc faite de faire le calcul sur les dix dernières années. Naturellement on ne précise pas que la carrière dans la fonction publique est linéaire alors que, dans le privé, elle est en cloche. Il n’est pas certain que les agents du privé soient désireux de voir calculer leur pension de retraite sur les six derniers mois. Beaucoup sont en pré retraite ou au chômage pendant cette période là.

- Ils insistent sur le déficit important prévu en 2017 : 21,3 milliards d’euros. Naturellement on ne rapproche pas ce nombre des 20 milliards d’euros accordés, sans contre partie réelle, aux entreprises pour accroître leur compétitivité. Annoncer 21,3 milliards d’euros impressionne plus que constater qu’ils ne représentent que 1% du PIB. Avec les 1%, l’effort à fournir apparaîtrait ridicule et ne justifierait pas l’application de nouvelles régressions.

- Ils mettent en avant l’évolution démographique et le ratio retraités/actifs. Bien sûr on ne souligne pas les progrès de compétitivité. La comparaison actifs/retraités doit tenir compte d’une production comparable des richesses pour être honnête. Traiter séparément le problème des retraites du contexte économique, de l’emploi, du maintien d’un euro fort, c’est fausser le débat.

- Ils avancent l’idée d’une réforme systémique des retraites. Avec la retraite par points ou celle des comptes notionnels plus besoin de se casser la tête pour assurer l’équilibre du système. Les salariés connaissent le montant des cotisations qu’ils doivent verser mensuellement, mais pas celui de leur pension qui dépendra de la situation économique au moment où ils seront en âge de partir en retraite.

- Et pourquoi pas ne pas dire qu’il faut en finir avec le salaire continué pour les fonctionnaires ? Avec la remise en cause de leur statut, c’est la notion de carrière qui est visée. La Cour des comptes n’a-t-elle pas dénoncé les avantages des employés d’E.D.F. comme excessifs ?

Le gouvernement, et avec lui les banques et les assurances, peuvent difficilement remettre en cause la notion même de pensions de retraite, voire même la notion de répartition car l’explosion des différentes bulles financières a rendu le public méfiant. Mais

réduire les pensions de retraite sous prétexte d’équilibre et laisser plus de place à la capitalisation est un objectif auquel ils n’ont pas renoncé.

L’IFRAP (Institut de formation et de recherche en accompagnement professionnel) estime que le système de retraite idéal doit comporter une part annexe – mais obligatoire – de capitalisation. D’après eux cela aurait plusieurs vertus : compenser la baisse probable (on devrait plutôt dire programmée) des pensions liée au déséquilibre démographique, aider à la constitution de fonds de pension en France qui investiraient bien plus dans l’économie française que la BPI (Banque publique d’investissement).

Le rapport Moreau a été remis au gouvernement. Il faut nous attendre à devoir combattre les idées avancées, soi-disant pour sauver le système, comme la désindexation des pensions sur les prix, l’allongement automatique de la durée de cotisation ou encore la remise en cause des allègements fiscaux pour les retraités… Ne nous laissons pas intoxiquer !

J-F RAJAU